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Du haut de mes 5 pieds 4 pouces, cheveux bruns mi-longs, je ressemble à bien des filles de mon âge : 29 ans. La vie m’a amenée à me poser des questions profondes, dont celle-ci, qui est fondamentale : comment l’être humain donne-t-il un sens à l’existence? Tout être humain – selon sa génération, son lieu de provenance, son unicité et son récit de vie – donnera une réponse différente et personnelle aux questions existentielles. 

Dans mon accompagnement de la dimension spirituelle de la personne, son récit de vie joue un rôle déterminant. C’est par la connaissance de cette histoire de vie qu’il est possible de cibler ce qui a été appui spirituel pour la personne. Dans mes interventions, je mobilise cet appui pour favoriser la continuation d’un récit de vie qui s’écrit toujours dans le temps malgré l’arrivée de la maladie. 

« Comment accompagnes-tu les personnes atteintes de démence? »

En apprenant à connaître leur histoire et à les côtoyer quotidiennement, j’arrive à reconnaître ce qui a encore une possibilité de faire jaillir chez la personne une expérience donnant encore bon goût à la vie. Par exemple, je tente de cibler chez une personne atteinte de démence la présence d’une sensibilité par les cinq sens (ouïe, odorat, vue, toucher, goût). Ensuite, vient le temps de créer un atelier spirituel qui pourrait réveiller ses sens et favoriser une expérience qui pourrait transcender la rupture dans son récit de vie occasionnée par la maladie. Deux de mes outils préférés pour entrer en relation avec les résidents sont la musique (chant) et le massage des mains. Ces derniers permettent soit une activation du sens de l’ouïe favorisant le contact avec la beauté de l’harmonie musicale, soit une activation du sens du toucher, par le contact physique, pouvant favoriser l’émergence d’un instant de paix au-delà du bris de communication qui existe régulièrement entre une personne atteinte de démence et celle qui ne l’est pas.

Il y a également ceux et celles pour qui la pratique de la religion catholique a fait partie intégrante de leur histoire de vie. Je me rends donc à leur chambre pour leur offrir communion et temps de prière afin de les reconnaître dans leurs croyances et favoriser la continuité de leur histoire spirituelle. Bien que je ne me considère pas moi-même pratiquante catholique, je ne ressens pas le choc culturel entre ma génération et celles qui précèdent. Bien que nous ayons des référents distincts (religions, philosophies) en matière d’interprétation de l’existence, il n’en reste pas moins que les grandes questions existentielles restent les mêmes et que je rejoins leur humanité.

Témoignage d’une résidente atteinte de paralysie cérébrale du Centre d’hébergement Saint-Augustin : « Lorsque j’ai appris que mon copain avait décidé d’avoir l’aide médicale mourir (AMM), une chance que vous étiez là pour me ramasser. J’avais besoin d’une présence qui allait pouvoir m’entendre dans un moment où je me sentais devenir complètement folle. Alors que je passais dans le corridor et que j’avais l’impression d’être dans le noir, vous m’avez interpelée, puis vous avez sûrement ressenti que je n’allais pas bien. Vous m’avez invitée dans votre bureau avec délicatesse.

Par la suite, vous nous avez accompagnés, mon copain et moi, jusqu’au jour de l’AMM. Vous nous avez permis de faire une sorte de bilan et mon copain m’a exprimé quelles valeurs il souhaitait me laisser en héritage. C’était touchant ! Une semaine avant l’AMM, on a vécu ensemble un rituel spécial. Depuis, Maude et moi, on se rencontre régulièrement. Nous parlons des changements que je vis à l’intérieur de moi, de ma manière de garder le cap dans mes deuils, des forces sur lesquelles je peux compter pour continuer. »

 

Maude Daigneault, intervenante en soins spirituels, Centre d’hébergement Saint-Augustin 

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